La Focaccia : déclinaisons locales - 2/2

La focaccia est un pain plat mythique d'Italie, mais saviez-vous qu'elle existe en de nombreuses variantes locales, allant du Nord au Sud de la Botte?

Les déclinaisons de la focaccia en Italie : de la focaccia di Recco à la scaccia ragusana

Vous l’avez compris la focaccia connait un certain nombre de déclinaisons locales du Nord au Sud de la Botte. La plus connue d’entre elles est probablement la focaccia di Recco, qui jouit d’une IGP depuis 2012. Bien que produite dans une ville voisine de Gênes, cette dernière n’a visuellement que peu de traits communs avec la focaccia traditionnelle. Il s’agit en réalité davantage d’une tourte croustillante fourrée d’un fromage local, le stracchino. Son histoire ne date pas non plus d’hier : certains textes attestent de son existence au temps des croisades, époque où les habitants de la cité, reclus derrière leurs fortifications, ne disposaient que de farine et de fromage pour subsister. Elle peut aujourd’hui être cuisinée avec différents types de fromages, mais sa production est circonscrite à une zone géographique délimitée afin de pouvoir bénéficier de l’IGP. C’est d’ailleurs à ce jour la seule focaccia à revendiquer le label européen.

La focaccia di Recco - Une focaccia sans fermentation garnie de stracchinon (spécialité de la ville de Recco)

Dans la région des Pouilles, la focaccia alla Barese connaît également un vrai succès. Souvent ronde, toppée de tomates et d’olives, cette version présente des faux airs de pizza. Sa véritable originalité ne se remarque toutefois pas au premier coup d'œil : c’est en effet dans la pâte, composée en partie de pommes de terre, qu’elle se différencie de sa cousine génoise. Son moelleux caractéristique s’explique également par deux autres facteurs : une fermentation indirecte et une plus grande proportion d’eau incorporée dans la pâte.

Tout au bout de la Botte, en Calabre, et de l’autre Côté du détroit de Messine, en Sicile, les focaccias connaissent une déclinaison à pâte fine, disposées l’une sur l’autre, entre lesquelles s’intercale une garniture qui varie selon les localités, souvent constituée d’anchois, de scarole, de tomates hachées ou d’oignons.

Il existe en Sicile une déclinaison plutôt originale : la scaccia ragusana. 

Préparée avec une semoule de blé dur, elle consiste en une pâte fine, farcie, et roulée sur elle-même. La garniture varie selon les goûts et les saisons, mais la plus consommée reste la scaccia farcie au fromage et à l’oignon.

Modica et Syracuse se disputent la paternité de cette spécialité. La première privilégie l’oignon et la ricotta pour la farce, tandis que la seconde préfère le fromage, la saucisse et les pommes de terre.

Historiquement, il est d’ailleurs intéressant de noter que l’existence de telles garnitures a permis à la focaccia, dans certaines provinces, d’échapper aux taxes appliquées au pain.

« Historiquement, il est d’ailleurs intéressant de noter que l’existence de telles garnitures a permis à la focaccia, dans certaines provinces, d’échapper aux taxes appliquées au pain. »

Pour ne pas froisser les sensibilités locales, il faut également faire mention d’un certain nombre de variantes, toutes plus savoureuses les unes que les autres.

ENCORE DE NOMBREUSES DÉCLINAISONS rÉgionales MOINS CÉLÈBRES

La focaccia de Camogli, par exemple, à la texture plus dure, s’apparente davantage à un biscuit. Celle de Voltri, pourtant voisine, est à l’inverse beaucoup plus souple. En Toscane, on l’appelle schiacciata, et elle consiste en une simple pâte à pain à l’huile d’olive.

Certaines focaccias sont même élaborées avec des farines différentes : c’est le cas de la focaccia secca, à base de farine de maïs, ou de la farinata, issue de farine de pois chiches.

Enfin, une spécialité fait débat quant à sa qualification: la sardenaira. S’agit-il d’une pizza ? D’une focaccia ? Très semblable à la pissaladière provençale, cette dernière consiste en une pâte à pain (rectangulaire) simplement garnie d’ail, d’anchois, et d’huile d’olive. Son origine, attestée dès le XVe siècle, est d'ailleurs antérieure à la pizza napolitaine.

LA FOCACCIA DOLCE

Que les becs sucrés se rassurent : il existe également plusieurs variantes que l’on peut déguster au dessert, ou au goûter. En Vénétie, la foccacia veneta est particulièrement populaire à Pâques. Préparée avec des œufs, du sucre et du beurre, elle est souvent parfumée aux agrumes. En Ombrie, on utilise une base de focaccia non salée pour la saupoudrer de sucre. On peut également insérer dans la pâte des raisins secs, des amandes, ou du miel. Une recette quasi-similaire existe en Ligurie, la focaccia di Lerici, à laquelle on ajoute traditionnellement du marsala (vin originaire de Sicile).

Focaccia dolce - Focaccia sucrée

LA FOCACCIA AU DELÀ DES FRONTIÈRES

Bien entendu, la focaccia a essaimé au-delà des frontières italiennes

Il existe par exemple au Tyrol autrichien une variante sucrée, l’Osterfochaz, ou fochaz, qui est consommée à Pâques, en guise de cadeau des parrains et marraines à leurs filleuls.

Il faut également mentionner la fougasse provençale, qui partage d’ailleurs la même étymologie. Sa pâte se prépare de façon quasi-identique, mais contrairement à sa cousine italienne, elle est souvent fourrée d’olives, de lardons, d’anchois ou de champignons.

La diaspora italienne du début du XXe siècle aux Amériques a participé à sa diffusion outre-Atlantique. A Buenos Aires, la fugazza (difficile de ne pas deviner la parenté) est devenu un plat populaire. Pour en donner une définition simple, on pourrait dire qu’il s’agit du mariage entre la pizza napolitaine et la focaccia génoise. Elle est souvent garnie d’oignons, de fromage, et parfois d’olives, et aurait été inventée par un Génois dénommé Juan Banchero, installé en Argentine au début du siècle dernier. Sa pizzeria-focacceria existe toujours dans le quartier historique de La Boca, où les premiers immigrés Italiens s’installèrent.

Aux Etats-Unis, la focaccia s’est également bien implantée. On peut la retrouver tout aussi bien en version salée que sucrée. Une boulangère du Massachusetts, Teri Culleto, a même inventé le focaccia bread art, qui consiste à en décorer la croûte de divers motifs, à base d’herbes, de fruits ou de légumes, pour la faire ressembler à un tableau comestible.


Spécialité millénaire et populaire
, la focaccia est devenue aujourd’hui un incontournable de la street-food. Chez Ezope, on trouve même que c’est le pain idéal pour un sandwich. En attendant de vous expliquer pourquoi dans un prochain article, on vous suggère de venir le goûter pour vous en convaincre !

Une focaccia en version sandwich par le restaurant EZOPE à Nantes !

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